Découvrez l'œuvre du mois de mai, choisie par la directrice du musée Sophie Lessard !
Toutes les fois que je contemple, en réserve, ce dessin d’assez petit format, l’enfance me revient. Mes grands-parents vivaient près de la Tour Carrée à Saint-Guénolé. Jean Bazaine possédait, non loin, un atelier.
L’été, chaussé de ses éternelles sandales en cuir vieilli, il venait de temps à autres bavarder avec mon grand-père. Je l’entends, encore, évoquer son projet de création de vitraux pour la chapelle de la Madeleine, des « violets », si particuliers, du ciel de Saint-Guénolé, des mosaïques de la station de métro « Cluny-La Sorbonne ». C’était alors un immense artiste, qui aimait ce pays pour lequel il avait eu un coup de foudre en 1936 et qui lui fournissait ses principaux thèmes d’inspiration. Jean Bazaine appréciait les gens simples qui y vivaient.
Ce dessin, exécuté en 1970, correspond à une date charnière dans la trajectoire artistique de Jean Bazaine. Il réduit alors sa palette à quelques couleurs essentielles. Le dessin constitue un aspect fondamental dans l’œuvre de Jean Bazaine servant de point de départ à ses toiles. Il pratiquera toute sa vie.
Réalisé d’après nature, il incarne pour moi, non pas l’abstraction mais le monde et notamment la force des éléments de la nature : la mer, le vent, les embruns, la terre, transposés en jaillissement de violets, de rouges violacés. Le coup de vent semble figuré par ces traits posés en rafales. « Dessiner d’après nature, c’est simplement pour moi incorporer par la main, plus profondément que par la vue, ces rythmes, ces forces, ces structures – les faire miens » dit Jean Bazaine.